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Crise de l'agroalimentaire Le gouvernement au chevet de la Bretagne

PARIS, 15 oct 2013 (AFP) - Le gouvernement se penche mercredi au chevet de la Bretagne, frappée par une crise de son modèle agricole et des fermetures de sites agroalimentaires qui risquent de favoriser le vote FN et un rejet de l'Europe dans cette région jusqu'ici plutôt modérée.

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Marque de l'inquiétude qui a saisi le sommet de l'Etat : c'est Jean-Marc Ayrault lui-même qui présidera mercredi à 11h45 à Matignon une réunion d'urgence sur la crise de l'agroalimentaire en Bretagne. Six ministres - Stéphane Le Foll (Agriculture), Guillaume Garot (Agroalimentaire), Michel Sapin (Travail), Arnaud Montebourg (Redressement productif), ainsi que les "Bretons" Jean-Yves Le Drian (Défense) et Marylise Lebranchu (Réforme territoriale) - seront présents à l'issue du Conseil des ministres pour tenter de trouver des solutions.

La suppression de près de 900 emplois à l'abattoir Gad de Lampaul-Guimiliau (Finistère) est en effet venue s'ajouter vendredi à la liste déjà longue d'entreprises agroalimentaires visées ces derniers mois par des plans sociaux. Après de spectaculaires mobilisations lundi à Brest et Morlaix (Finistère) pour défendre ce secteur en détresse, une nouvelle journée de mobilisation est prévue mercredi à l'appel de Produit en Bretagne, qui regroupe quelque 300 entreprises et plus de 100.000 salariés, et de l'Association bretonne des entreprises agroalimentaires.

L'enjeu est de taille pour la Bretagne : l'agroalimentaire et l'agriculture y représentent pas moins d'un tiers des emplois de la région. « On est effectivement préoccupés car il y a une conjonction d'un certain nombre de problèmes de sinistres industriels, de problèmes de modèle agricole qui est en crise et là-dessus vient s'ajouter la question de la mise en œuvre de l'écotaxe au 1er janvier », a-t-on expliqué à Matignon. « Le gouvernement est depuis plusieurs semaines soucieux et mobilisé pour que les problèmes immédiats soient réglés, dont le chômage des salariés des sites en restructuration, mais également que soit donnée une perspective de moyen terme », a ajouté un conseiller du Premier ministre.

Au-delà des enjeux économiques et sociaux, le gouvernement s'inquiète des conséquences dans les urnes en 2014 de la crise bretonne. La Bretagne avait placé François Hollande largement en tête du premier tour de la présidentielle de 2012, avec 31,7 % des voix, loin devant Nicolas Sarkozy (25,6 %) et Marine Le Pen (13,2 %). Mais cette région traditionnellement rétive au vote extrémiste et plutôt européenne pourrait évoluer l'année prochaine.

Un pacte comme en Lorraine ?

« La situation actuelle, c'est de la dynamite, la Bretagne est en colère ! » se désole un ministre. Selon lui, l'ouest de la France est de « moins en moins tourné vers l'Europe », du fait en particulier de la directive sur le détachement des travailleurs. Cette directive indique que si un Etat membre prévoit des conditions d'emploi minimales, dont un salaire minimum, ces dernières doivent également s'appliquer aux travailleurs détachés dans cet Etat. Cette directive engendre ainsi du dumping social, avec notamment des salaires "low cost" dans les abattoirs en Allemagne qui ne dispose pas de salaire minimum. « Certains salaires peuvent descendre jusqu'à 4 euros de l'heure », a dénoncé le ministère de l'Agroalimentaire.

« Je crains qu'aux élections européennes, les Bretons ne montrent plus autant d'ardeur européenne, ce serait un choc considérable », s'alarme un proche du chef de l'Etat. Selon ce conseiller, le Finistère est particulièrement touché : « Ils ont le sentiment que le bout de la péninsule subit le choc le plus dur ». « Les gens tombent dans une forme de désespérance, ils constatent que l'Etat est impuissant, c'est terrible », met en garde ce conseiller de François Hollande.

Devant l'ampleur de la tâche, la réunion de mercredi ne constitue « pas une fin » en soi, mais « plutôt le début de quelque chose », selon Matignon. Le gouvernement pourrait ainsi à terme proposer à la Bretagne un partenariat spécifique, un pacte à l'image de celui signé en septembre entre l'Etat et la Lorraine pour aider cette région frappée par la désindustrialisation. « Lorsque les régions connaissent des difficultés particulières, le gouvernement agit davantage (...) Eh bien, nous sommes prêts à faire la même chose pour la Bretagne que ce que nous faisons pour la Lorraine », avait assuré le 2 octobre Jean-Marc Ayrault à l'Assemblée nationale.

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